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Cours destiné aux élèves du secondaire             M. Diallo Lycée Mame Cheikh Mbaye

 

Eléments de versification

Généralité

Au second cycle, notamment en classe de seconde, les élèves sont confrontés à l’étude de la composition des poèmes, surtout des poèmes en vers. Ainsi la versification est une notion nouvelle mais aussi assez vaste car impliquant de nombreux aspects de la grammaire et de la linguistique. C’est pourquoi dans ce présent article nous nous proposons de réfléchir sur ces différents aspects.

Définition

Si l’on décide de s’entendre pour une définition univoque de la versification, l’on dirait que c’est la science linguistique qui étudie la composition des poèmes en vers.

Mais  qu’est-ce qu’un vers? A cette question, on répondrait que c’est chacune des lignes d’un poème qui commence toujours par une majuscule et se termine par un retour à la ligne. Les vers se caractérisent par leurs mesures, leurs rimes et leurs rythmes

Le mètre

Le mètre est la mesure du vers. On le caractérise en comptant le nombre de syllabes qui y sont contenues. Ainsi nous pouvons avoir des vers de : 1 syllabe, appelé monosyllabe, 2 syllabes (dissyllabe), 3 syllabes, (trissyllabe), 4 syllabes (tétrasyllabe), 5 syllabes (pentasyllabe), 6 syllabes (hexasyllabe), 7 syllabes (heptasyllabe), 8 syllabes (octosyllabe), 9 syllabes (énnéasyllabe),10 syllabes (décasyllabe), 11 syllabes (hendécasyllabe), 12 syllabes (dodécasyllabe ou alexandrin).

On peut trouver d’autres mètres comme des vers de 13, 14, 15, etc.

 

Le décompte syllabique

 

L’unité de base de la poésie française est la syllabe. Pour compter le nombre de syllabes que contient un vers, il faut le scander, c’est-à-dire le lire en séparant clairement les syllabes qui le composent.

Autrefois, tous les sons de la langue française étaient prononcés, ce qui n’est plus le cas aujourd’hui. Aussi pour calculer les syllabes, il convient de connaître deux règles particulières, celle du « e » muet et celle de la diphtongue. (Il existe d’autres règles.)

 

La règle du « e » muet

 

Le « e » muet de la poésie ne correspond pas toujours à celui du langage parlé.

a. Il se prononce et compte pour une syllabe entre deux consonnes (le h aspiré comptant pour une consonne) :

 Consonne + e + consonne :

Un cœur tendre qui hait le néant vaste et noir

 Consonne + e + h aspiré : (on ne peut pas faire de liaison avec un ou une)

Un tendre hérisson sommeillait à l’automne

b) Il ne se prononce pas et ne compte pas pour une syllabe :

- À la fin des vers :

Du passé lumineux recueille tout vestige

 -Devant une voyelle :

Ils oublieront de s’en tenir à l’essentiel

-Devant un « h » muet : (on peut faire une liaison avec un ou une)

Demande-lui quelle heure il est

La règle de la diphtongue ou du hiatus           

On appelle diphtongue deux voyelles qui se suivent à l’intérieur d’un mot (exemple : Familier). Elles peuvent être prononcées en une ou deux émissions de la voix (fa/mi/lier ou fa/mi/li/er) et compteront selon le cas pour une ou deux syllabes.

     

      La synérèse

 On appelle synérèse une diphtongue prononcée en une seule émission de voix (donc les voyelles sont prononcées distinctement dans la même syllabe).

La diérèse

 On appelle diérèse une diphtongue prononcée en deux émissions de voix (les voyelles du hiatus sont prononcées dans des syllabes différentes.)

Quand le mètre du vers est paire, on parle de vers parisyllabique ; dans le cas contraire, de vers imparisyllabique.

La strophe

Les rimes sont disposées, dans le cadre de la strophe et/ou du poème, suivant des combinaisons variées. Les regroupements de vers ainsi dessinés forment des strophes.

En général, un poème est composé d’un même schéma strophique, répété à l’identique un certain nombre de fois. Dans ces lignes, il est seulement possible de présenter les formes les plus fréquemment employées dans la poésie classique. Les principales strophes sont:

 

Un monostique : 1 seul vers. C’est l’exemple du poème d’un seul vers le plus connu, celui d’Apollinaire :

 

 Et l’unique cordeau des trompettes marines.

« Chantre ».

Un distique : strophe de 2 vers

Un tercet : strophe de 3 vers

Un quatrain : strophe de 4 vers

Un quintil : strophe de 5 vers

Un sizain : strophe de 6 vers

Un septain : strophe de 7 vers

Un huitain : strophe de 8 vers

Un dizain : strophe de 10 vers

Un douzain : strophe de 12 vers.

 

Le distique                                                 

Lorsque deux vers qui se suivent riment ensemble, on parle de distique :

 

Bon chevalier masqué qui chevauche en silence,

Le Malheur a percé mon vieux cœur de sa lance.

 

Le sang de mon vieux cœur n’a fait qu’un jet vermeil,

Puis s’est évaporé sur les fleurs, au soleil. (Verlaine)

 

Dans la citation ci-dessus, chaque strophe ne compte que deux vers, et chaque finale de chaque regroupement time avec l’autre. On note usuellement le distique sous la forme (AA). Chaque distique forme une strophe minimale, c'est-à-dire un regroupement minimale de vers par la rime : il ne peut évidemment y avoir de strophe de moins de deux vers puisque, pour qu’il y ait strophe il faut qu’il y ait regroupement de vers, et pour qu’il y ait regroupement de vers, il faut et il suffit qu’il y en ait deux. La forme (aa) se rencontre très souvent dans la tragédie et la comédie en vers, du 17e siècle à la première moitié du 19e.

 

Le quatrain

Les regroupements de vers autres que le distique les plus fréquemment employés dans la poésie classique sont le quatrain et le sixain.

Le quatrain classique est constitué par un regroupement de quatre vers. Ses rimes sont embrassées, c'est-à-dire que la première paire rimique, (A…A) enserrant la seconde, comme dans :

 

Heureux celuy qui souffre une amoureuse peine A

Pour un nom si fatal: heureuse la douleur, B

Bien-heureux le torment, qui vient pour la valeur B

Des yeux, non pas des yeux, mais de l'astre d'Helene A

Pierre de Ronsard, Sonnets pour Hélène, 1578

 

Le quatrain à rimes croisées est noté (abab) et celui à rimes embrassées (abba).

NB : Lorsque tous les vers d’un poème ont la même mesure on parle de poème à vers isométriques. S’ils sont de mètres différents on parle de poème à vers hétérométrique.

*                      La rime

Etudier les rimes d’un poème revient à voir comment elles sont disposées, leur qualité et leur genre.

*                      La disposition

Les rimes peuvent se disposer de trois manières différentes. Elles peuvent se suivre. Elles ont le schéma AA, BB, CC, etc. On parle alors de rimes suivies ou plates.

Exemple

Dors, justicier futur, dompteur des anciens crimes, A

Dans l'attente et l'orgueil de tes faits magnanimes ; A

Toi que les pins d'Oeta verront, bûcher sacré, B

La chair vive, et l'esprit par l'angoisse épuré, B

Laisser, pour être un dieu, sur la cime enflammée, C

Ta cendre et ta massue et la peau de Némée ! C

 

Charles Leconte de Lisle (1818-1894) Poèmes antiques (1852)

Les rimes peuvent être croisées selon le schéma ABAB, CDCD, etc. on parle dans ce cas de rimes croisées ou alternées ou encore entrelacées.

Exemple :

Viens, le soleil te parle en lumières sublimes ; A

Dans sa flamme implacable absorbe-toi sans fin ; B

Et retourne à pas lents vers les cités infimes, A

Le cœur trempé sept fois dans le néant divin. B

 

Charles Leconte de Lisle (1818-1894) Poèmes antiques (1852)

 

Enfin, les rimes sont dites embrassées ou enlacées quand elles se présentent sous le schéma ABBA, CDDC, etc.

Exemple :

 

De même qu'au soleil l'horrible essaim des mouches A

Des taureaux égorgés couvre les cuirs velus, B

Un tourbillon guerrier de peuples chevelus, B

Hors des nefs, s'épaissit, plein de clameurs farouches. A

 

Charles Leconte de Lisle (1818-1894) Poèmes barbares (1862)

*                      La qualité

 

La qualité d’une rime est fonction du nombre de sons qu’on y entend. C’est pourquoi l’alphabet phonétique international peut, ici, être d’un grand apport.

 

Si l’on considère les rimes en BB de la deuxième strophe ci-dessus, on n’a qu’un son identique à la fin des deux vers.

Dans sa flamme implacable absorbe-toi sans fin ;

Le cœur trempé sept fois dans le néant divin.

« Fin » » rime avec divin » et le son commun est ″in″. On a donc une rime pauvre

Si les sons identiques sont au nombre de deux seulement, on parle de rime suffisante.

 

Exemple :

De même qu'au soleil l'horrible essaim des mouches A

Des taureaux égorgés couvre les cuirs velus, B

Un tourbillon guerrier de peuples chevelus, B

Hors des nefs, s'épaissit, plein de clameurs farouches. A

Le mot « mouches » rime avec le mot « farouches » et la rime est en ″ouches″.  Nous avons deux sons identiques ″ou″ et ″ches″, donc une rime suffisante.

Si les sons identiques sont au nombre de trois ou plus, on parle de rime riche.

Exemple :

Midi, roi des étés, épandu sur la plaine, A

Tombe en nappes d'argent des hauteurs du ciel bleu. B

Tout se tait. L'air flamboie et brûle sans haleine : B

La terre est assoupie en sa robe de feu. B

Charles Leconte de Lisle (1818-1894) Poèmes antiques (1852)

 

Dans ce quatrain, les mots « plaine » et « haleine » rime ensemble. Les sons identiques sont ″l″ + ai″ + ″ne″, alors on parle derime riche.

NB : Nous reprenons ici les lettres qui composent les sons. Le système avec lequel nous travaillons (Office Word 2010) ne supporte pas les caractères de l’Alphabet Phonétique International.

*   Le genre

Une rime est soit masculine ou féminine. Elle est féminine quand elle se termine par un e muet même suivi de s ou de nt marque du pluriel. Elle est masculine dans les autres cas.

NB : Dans les désinences verbales de l’imparfait et conditionnel, le e muet est précédé d’une voyelle, notamment i ; la rime est dite dans ce cas masculine.

Exemple :

                Ils levaient

                Ils lèveraient

*   Le rythme

Le rythme d’un vers dépend du nombre d’accent toniques  qui y sont. Les accents toniques sont les intonations que l’on réalise quand on prononce le vers.

Soit ce vers de Hugo, on a quatre accents :

Je ne puis  demeurer loin de toi plus longtemps

Pour étudier le rythme d’un vers on place les accents sur la dernière syllabe du mot ou du groupe de mots. Lorsque mot est terminé par un e muet l’accent retombe sur l’avant dernière syllabe, qui forme ainsi avec l’unité grammaticale qui suit un groupe rythmique.

Exemple :

J’ai longtemps/ habité//sous de vas/tes portiques 

Lorsque le e muet est dans une désinence verbale de l’imparfait ou du conditionnel d’un mot se trouvant à l’intérieur du vers, il allonge non pas la voyelle de la syllabe précédente (ce qui ferait que l’accent porte sur cette syllabe) mais la syllabe dans laquelle il se trouve.

Exemple :

Les va/gues du matin//se /vent une à une.

    2               4                     2                 4

Les va/gues du matin//se levaient/une à une.

    2                 4                     3                 3

·      Le rythme binaire

On parle de rythme binaire quand un vers ou les deux moitiés d’un vers sont divisées en mesures égales.

Exemple :

J’ai longtemps/ habité//sous de vas/tes portiques 

          3                  3                  3                   3

J’irai /par la  forêt//, j’irai/ par la montagne

          2               4                 2                  4

·     Le rythme ternaire

 

Un rythme est dit ternaire lorsqu’un vers est divisé en trois mesures égales.

Exemple :

Horreur des bois, / horreur des mers, / horreur des cieux

                4                               4                                4

      Je marcherai /les yeux fixés /sur mes pensées

             4                       4                          4

Le vers qui a un rythme ternaire peut être appelé trimètre.

·      Le rythme croissant

 

Un rythme est croissant lorsque la mesure des groupes rythmiques est de plus en plus longue. Dans le cas contraire, on parle de rythme décroissant.

Exemple :

Je te por/te dans moi// comme un oiseau blessé.

    3                 3                             6

O rage !/ O désespoir !// O vieillesse ennemie′ !

      2                  4                           6

 

·      Le rythme accumulatif

 

Un rythme est dit accumulatif si le nombre d’accents toniques dans un vers dépasse la moyenne c’est-à-dire quatre dans un alexandrin.

Exemple :

Demain, dès l’aube, à l’heure où blanchit la campagne,

      L’enjambement

On parle d’enjambement lorsque la phrase ne s’arrête pas à la rime mais déborde jusqu’à la césure (appelé aussi rejet ou enjambement à la césure) ou la fin du vers suivant. L’enjambement traduit souvent un mouvement qui se développe, une durée qui se prolonge, un sentiment qui s’amplifie.

Exemple :

« Nous avons aperçu les grands ongles marqués

   Par les loups voyageurs que nous avions traqués. »

Alfred de Vigny, « La Mort du Loup ».

    Le rejet

On parle de rejet lorsqu’un élément court de la phrase ou une unité grammaticale (sujet, verbe ou complément) est rejeté au vers suivant. Le membre de phrase ainsi rejeté dépend syntaxiquement du vers précédent.

Le rejet permet la mise en relief d’un mot clé.

Exemple :

 « Même il m’est arrivé quelque fois de manger

    Le berger. »

La Fontaine

  Le contre-rejet

On parle de contre-rejet lorsqu’un élément court ou une unité grammaticale commence, dans un vers ou vers sa fin,  la phrase qui se développe dans le vers suivant.

Le contre-rejet, comme le rejet, crée une rupture rythmique qui met particulièrement en relief un élément de la phrase ou du sens.

Exemple :

 « Souvenir, Souvenir, que me veux-tu ? L’automne

    Faisait voler la grive à travers l’air atone ».

Paul Verlaine, Poèmes saturniens

Les formes poétiques

Les formes fixes

a) La Ballade : Poème lyrique constitué généralement de trois strophes identiques (souvent de 8 ou 10 vers, avec des rimes réparties selon la structure ABABBCBC ou ABABBCCDCD) se terminant par un refrain, et d'une demi-strophe appelée l'envoi, qui reprend les dernières rimes et le refrain.

b) le rondeau : Il comporte en général entre 12 ou 15 vers répartis sur 3 strophes de 5-3-6 ou 4-3-5 vers ces trois strophes présentent deux rimes avec un refrain à la fin des strophes 2 et 3 qui reprend le premier hémistiche du vers 1.

c) le sonnet : C'est la forme poétique la plus connue. Il s'agit d'un poème de 14 vers, groupés en deux quatrains et un sizain, lui-même séparé en deux tercets. La disposition des rimes est en général la suivante : ABBA, ABBA, CCD, EDE (ou bien EED).

d) Le pantoum: c'est un poème formé de quatre quatrains, caractérisé par des rimes croisées. Il est construit de telle sorte que le deuxième et le quatrième vers d'une strophe forment le premier et le troisième vers de la strophe suivante.

Le vers libre

Le vers dit libre, ne se définit pas par le nombre. Il répond à un principe spatial ou typographique: un vers libre est une ligne typographique libre (c'est-à-dire qu'on peut l'interrompre où l'on veut avant la marge droite et parfois au-delà à la ligne suivante).

Tu marches vers Auteuil tu veux aller chez toi à pied

Dormir parmi tes fétiches d'Océanie et de Guinée

Ils sont des Christ d'une autre forme et d'une autre croyance

Ce sont les Christ inférieurs des obscures espérances

Adieu Adieu Soleil cou coupé

Guillaume Apollinaire, Alcools,

**FIN**

Toute ma reconnaissance et mes remerciements à la cellule pédagogique de français du Lycée Mame Cheikh Mbaye !

Octobre 2011

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  • M. Diallo
  • Diplômé de la FASTEF ex École Normale Supérieure.
Maitrise ès Lettres modernes. Licence ès Lettres modernes.
Certificat de spécialisation en grammaire classique et modernes.
  • Diplômé de la FASTEF ex École Normale Supérieure. Maitrise ès Lettres modernes. Licence ès Lettres modernes. Certificat de spécialisation en grammaire classique et modernes.

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